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Festivités

 

     Le calendrier du Burkina est riche en jours fériés et en festivités ; fêtes catholiques, fêtes musulmanes, fête du travail, armistice de 1914, 1940, fête de l'indépendance, fête de la prise du pouvoir du 4 août 1983, journée de la femme, etc., etc. Les fêtes religieuses sont l'occasion d'inviter les amis d'autre confession (pour Noël et Pâques, les musulmans rendent visite aux Chrétiens pour leur souhaiter une bonne fête et inversement pour le Ramadan et pour la Tabaski (Aïd)). Chacune de ces fêtes engage beaucoup de dépenses pour les repas, les boissons et les habits, car ici, les fêtes religieuses sont l'occasion de se faire coudre un nouvel habit. Je n'insisterai pas, aujourd'hui, sur la duplicité de cette communion entre musulmans et chrétiens qui s'évanouit lors des palabres (« oui mais nous les chrétiens nous sommes comme-ci » ou bien « chez nous, musulmans on ne peut accepter cela »…). En revanche j'insisterai plutôt sur le hors champ de ces fêtes, ce qu'elles masquent, ce qu'elle dissimulent. En nourrissant un pays pauvre de festivités régulières et coûteuses, on endort tout un peuple à l'aide de banquets et de boissons, sapant ainsi les ressources qui pourraient l'amener à s'élever ou à se rebeller. Le phénomène est encore plus criant en ce qui concerne les fêtes nationales.

 

     Petit rappel historique : la nuit du 3 Août 1984, le Capitaine Thomas Sankara prend le pouvoir à la suite d'un coup d'état qui épargne cependant la vie à l'ancien président. C'est le début de la révolution Sankariste. Sankara souhaite organiser de nombreuses réformes en faveur du développement de son pays et contre la tutelle de la France et des autres rapaces qui rodent autour de son pays. Il réforme le fonctionnement des services publiques en exigent plus de rigueur des fonctionnaires, modifie le découpage administratif des régions et des villes pour que celui-ci ne coïncide plus avec les secteurs d'influence des chef coutumier (afin de rendre les institutions plus autonomes et intègres). C'est avec Sankara que la Haute Volta deviendra Burkina Faso (Pays des hommes intègres). Bonnes initiatives, excès de pouvoir ? Il n'empêche  que dans toute l'Afrique le nom de Sankara résonne de la même manière qu'ailleurs celui de Che Guévara. L'épopée fut courte puisqu'en 1987 il est assassiné lors d'un complot organisé par son ancien compagnon d'armes, Blaise Compaore, au pouvoir depuis 20 ans.

 

Pour plus d'information sur l'histoire du pays, je vous invite à lire un extrait de mon travail de 2006 disponible ici.

 

 

     20 années de pouvoir, donc ; cela se fête !  Et voilà que le président à organisé de grandes festivités dans son village, Ziniaré. La presse parle d'un budgets gravitant autour des 500 millions de FCFA (5 millions de nos anciens francs). Pour s'assurer d'un public conséquent, des bus viennent ramasser des villageois à qui on donne de l'argent liquide qui leur assurera la subsistance durant les festivités. Les présidents du monde entier sont invités. Un seul fera le déplacement, Lula.

 

      Pendant ce temps, en ce 15 octobre 2007, date anniversaire de la prise de pouvoir du président, une autre cérémonie se déroule, à Ouagadougou. Dans un cimetière qui ressemble plus à une décharge publique qu'à autre chose, se pressent des milliers de personne venus entourer la veuve Sankara revenue de France pour l'anniversaire de l'assassina de son mari. Les embûches n'ont pourtant pas manqué, tous les lieux de manifestations publiques  de la capitale lui ont été refusés. Malgré cela, la presse est unanime, le prestigieux anniversaire de Blaise Comparé, qui devait masquer celui de son ancien compagnon, fut un véritable échec médiatique au regard d'immense succès du très sobre anniversaire de la mort de Sankara .

 

     Mais déjà, un autre anniversaire s'annonce et il faudra encore le masquer par de pompeuses cérémonies. Il s'agit du huitième anniversaire de l'assassina du journaliste Norbert Zongo. A l'époque, la nouvelle avait suscité beaucoup d'émois dans le pays et la situation frisait la guerre civile. Pour mieux brider le 13 décembre (mort de Zongo), une semaine de manifestations publiques est organisée pour célébrer la journée du 11 décembre, date de la proclamation de la république de la Haute-Volta. Alors qu'en sera-t-il cette fois ? Echec du président ou bien  de ceux qui souhaitent la démocratie et la liberté d'expression ? Cela dépendra entre autre des moyens militaires et policiers qui seront déployés pour assurer le bon déroulement des festivités du 11 décembre et subjuguer l'anniversaire du 13…

 

                                                                                         A.D, 10 décembre 2007

 

 

 



10/12/2007
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